Petit éloge des anti-héroïnes de séries

De Tony Soprano (Les Soprano) à Walter White (Breaking Bad) en passant par Don
Draper (Mad Men), la figure de l’anti-héros est omniprésente dans les
productions audiovisuelles et fait l’objet de nombreuses analyses. Les anti-
héroïnes, elles, ont encore tendance à passer sous les radars de la critique,
quand elles ne suscitent pas le rejet pur et simple des téléspectateur·rices.
Dans ce Petit éloge des anti-héroïnes de séries, les journalistes spécialistes
de séries Anaïs Bordages et Marie Telling rendent leurs lettres de noblesse
aux personnages féminins compliqués, imparfaits, parfois difficiles à aimer,
qui brisent les codes et proposent une vision de la féminité bien loin des
standards traditionnels. Ces anti-héroïnes sont des femmes maladroites,
revêches, coincées, obsédées, vaches, tordues, hystériques ou carrément
malveillantes. Certaines sont assez populaires, d’autres sont haïes par le
grand public. Chacune à leur manière, elles contribuent à élargir les normes
incroyablement restrictives de la représentation des femmes à l’écran et
permettent un processus d’identification puissant pour toutes celles qui ne se
retrouvent pas dans les cases très limitées qui leur sont réservées. Malgré
tout leur amour pour Buffy, les autrices déclarent ainsi leur flamme à la
peste de Sunnydale, Cordelia (Buffy contre les vampires). Elles font la
lumière sur des personnages féminins trop souvent oubliés, comme Martha de The
Americans, ou Betty dans Mad Men. Elles essaient de comprendre pourquoi des
personnages comme Charlotte York (Sex and the City), Hannah Horvath (Girls) ou
Skyler White (Breaking Bad) sont si universellement détestés, et elles
s’intéressent aux tarées les plus délicieusement manipulatrices du petit écran
que sont Jenny Schecter (The L Word) ou Kimberly Shaw (Melrose Place). À
travers une douzaine de catégories aux intitulés volontairement misogynes (les
pestes, les traînées, les carriéristes, les coincées, les castratrices, les
repoussoirs, les mères indignes…), reflet de la manière dont les anti-héroïnes
ont été pensées par leurs créateur·rices ou perçues par le public, Anaïs
Bordages et Marie Telling reviennent sur l’évolution de chacun de ces
stéréotypes dans l’histoire du petit écran et analysent plus précisément
quelques personnages au sein de chaque catégorie. Elles esquissent ainsi une
typologie féministe de la représentation des femmes dans les séries… et nous
donnent envie d’aller les (re)découvrir. Marie Telling, 33 ans, est
journaliste, fondatrice du site BuzzFeed France et cheffe du service société-
culture à ELLE.fr. Anaïs Bordages, 31 ans, est journaliste et critique
indépendante, spécialisée en séries et cinéma. Elle a notamment dirigé la
rubrique Divertissement de BuzzFeed. Toutes deux ont écrit pour Slate.fr et
coaniment aujourd’hui les podcasts Peak TV (dans lequel elles analysent
l’actualité des séries) et AMIES (où l’une fait découvrir à l’autre sa série
fétiche) pour Slate Podcasts. Après avoir grandi à Bordeaux, Marie Telling a
débuté sa carrière de journaliste à New York, où elle est restée sept ans.
Elle vit actuellement dans le 17e arrondissement de Paris, après avoir passé
du temps dans le 3e et le 9e. Originaire de Toulouse, Anaïs Bordages a vécu à
Austin et New York pendant ses études. Elle habite aujourd’hui dans le 20e
arrondissement de Paris, après avoir passé dix ans dans le 9e.