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Plain-chant, Liturgie IX  Sonnets 2007-2008
EAN13
9791026710769
Éditeur
Champ Vallon
Date de publication
Collection
Champ Vallon
Langue
français
Langue d'origine
français
Fiches UNIMARC
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Plain-chant

Liturgie IX Sonnets 2007-2008

Champ Vallon

Champ Vallon

Livre numérique

  • Aide EAN13 : 9791026710769
    • Fichier EPUB, avec Marquage en filigrane
    15.99

  • Aide EAN13 : 9791026710776
    • Fichier PDF, avec Marquage en filigrane
    15.99

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« Les vieux regardent combien de temps il leur reste ; / Les autres gâchent
sans compter ce qu’ils n’ont pas. / Chacun brait pour qu’on l’écoute ; il en
est qui disent / Savoir quelque chose ; et il en est qui écrivent, /
Convaincus de leur don. Le papier souffre tout. » Des passages comme celui-ci,
que l’on peut sans peine qualifier de « critiques » (critique des hommes,
critique de notre temps ; critique des hommes de notre temps), sont plus
nombreux qu’on ne le pense dans la poésie de Robert Marteau. Ils signalent,
ces passages, si souvent inaperçus dans la musique du sonnet, et parfois assez
cinglants, une condamnation de notre présent, désaccordé de la terre et du
temps. Mais plutôt que de se complaire dans cette condamnation que d’aucuns
n’hésiteraient pas à qualifier de rétrograde – mais c’est toujours en passant,
à peine quelques vers dans le courant du poème (puisque c’est un courant –
mais jamais la même eau) – Robert Marteau aura toujours préféré la louange
d’un naturel qui a sa source en dehors de nous, fustigeant l’artifice. S’il se
demande ce que chante la corneille, il ajoute aussitôt : « Qui s’avise
d’ailleurs de se le demander / Parmi le genre humain, lequel va dans un monde
/ À part, de son invention ; monde qu’occupe / L’ennemi, le mécanicien
prometteur / D’avenir et de progrès… » Ce qu’il y a d’absolument unique, dans
l’œuvre de Robert Marteau, ce sont ces sonnets qui lui furent donnés comme si
soudain, sous son pas de marcheur, une source avait jailli, dès lors devenue
intarissable. Lui-même s’interrogeait sur ce phénomène (inouï dans notre
poésie bien que personne, ou presque, ne s’en soit aperçu). Ainsi, le
troisième sonnet du vendredi 5 septembre 1997, où il n’en écrivit pas moins de
cinq : J’ai bien peur d’être aussi ennuyeux que n’importeQui avec tous ces
faux sonnets que j’accumulePour qui ? pour quoi ? et qui me viennent sans que
j’ySonge, allant à mon pas sur le lopin de terreOù je me trouve à tel ou tel
moment. Qu’y faire ?À vrai dire l’anxiété me prendrait siSoudain le débit
tombait à rien Me rassureAu contraire la coulée imprévue et mêmeIncohérente
qui aura pu prendre sourceAu gosier du geai ou de la corneille : cra !Cra !
C’est ce que je croyais avoir entendu,Et c’est un chapelet de mots
inattendusQue j’ai à recueillir, les ayant dans l’ouïe,Sur une page du carnet
que j’ai sur moi. S’il existe un poète de notre temps que les générations
futures (disons dans quelques siècles) pourront lire comme nous lisons
aujourd’hui Ovide ou Homère, alors ce sera lui : Robert Marteau. Ceci dit, il
m’a toujours semblé qu’un mot tel que émerveillement était un peu trop facile
pour qualifier cet immense poète sans certitudes avérées, malgré ces quelques
vitupérations aussi discrètes que passagères. Mais s’il existait un seul autre
mot, pour éventuellement le définir, alors il me semble que ce serait peut-
être celui-là : stupéfaction, selon les différentes acceptions du
dictionnaire. Car il n’en est jamais revenu, Robert, d’avoir été là. Les
quelque 1800 sonnets qui composent les quatre recueils (Liturgie, 1992 ;
Louange, 1996 ; Registre, 1999 ; Rites et offrandes, 2002) publiés par Champ
Vallon (belle constance, belle amitié) en témoignent à chaque vers ou presque
: « L’intelligence a beau, par la parole, suivre / Les méandres de sa plus
longue mémoire, elle / Abdique face au fait d’être là ; malgré elle /
S’interroge sur son sort ; difficilement / Se contente de ses limites. Elle
sait, / N’ayant pas eu le mot du commencement, qu’elle / Ne saurait non plus
avoir celui de la fin » C’est cette stupéfaction, disons-la originelle, qui
aura orienté Robert Marteau vers l’observation, aussi bien assidue que
naturelle, de notre monde et de notre condition humaine, « Déjà contemplant
dans l’herbe ses propres os », car, ainsi que le dit encore un autre sonnet du
même recueil (Rites et offrandes) : « …Tout ne tient / Qu’à un fil : ce qui
n’est qu’une façon de dire. » Il connaissait, il savait, Robert Marteau, cette
fragilité inhérente à chaque vie, humaine, animale ou végétale : « Un jeune
hêtre gît cassé par le vent. Notre / Lien est éphémère : un rien le rompt. La
fleur / Vient au jour, répand son parfum et sa couleur, / Fane, disparaît.
L’effort de la poésie / En est le constat… » Et c’est bien pourquoi, me
semble-t-il, à propos de ces sonnets qui, eux aussi, ne tenaient qu’à un fil,
on peut parler de miracle. Je ne crois pas qu’il en existe beaucoup dans la
poésie française. Jacques Lèbre Robert Marteau est né le 8 février 1925 à
Virollet, dans la forêt de Chizé (département des Deux Sèvres). À 19 ans, en
octobre 1944, il rejoint Paris. Il s’inscrit à la faculté mais n’a qu’un but :
écrire. Il trouve un travail à mi-temps au Palais de justice et abandonne
alors les études pour se consacrer à l’apprentissage de l’écriture en
traduisant Virgile et en lisant Marcel Proust, Paul Claudel… En 1946, il
retrouve Roger Parisot, lui aussi ancien lycéen à Niort, qui lui fait
découvrir Les Cahiers du Sud, Simone Weil, Jean Genet, Émile Soldi. Il écrit,
traduit et détruit tout. Il passe ses étés entre le Poitou et les Pyrénées, se
rend souvent en Espagne ; il marche, lit et écrit de la poésie. Il assiste aux
corridas de Bayonne et va alors consacrer tous ses étés aux taureaux. Grâce au
poème Taureaux dans Bayonne, il rencontre Camille Bourniquel qui l’engage à
collaborer à la revue Esprit. Il assure la direction artistique de courts
métrages commandés par la télévision de Radio-Canada et consacrés aux peintres
Jean Le Moal, Gustave Singier, Jean Bertholle, Roger Bissière, Jean Lurçat. Il
fait la connaissance de Henri Pichette grâce auquel il rencontre Gaston Miron.
En 1962, Michel Deguy l’invite à collaborer à sa revue Po&sie;; En 1965, il
quitte l’enseignement et entre au Centre national d’éducation populaire à
Marly-Le-Roi où il organise des expositions de peinture, de sculpture et des
séminaires. Il fréquente l’atelier de lithographies de Fernand Mourlot où il
réalise plusieurs ouvrages avec Marc Chagall. Il fait la connaissance d’Eugène
Canseliet, alchimiste opératif, éditeur de Fulcanelli. En 1967, il fait un
voyage et séjourne en Yougoslavie invité par son ami Miodrag Pavlovic. Il y
retourne en 1968 pour réaliser le court métrage Les Anges de Kurbinovo. En
1972, à la suite d’un séminaire avec des peintres et des poètes québécois il
est invité à l’université de Montréal. Il s'installe alors à Montréal avec sa
compagne. Il y demeure douze ans et prend la nationalité canadienne. Il
travaille pour son ami Fernand Ouellette réalisateur à Radio-Canada, fait
différents séjours, tant aux États-Unis qu’au Canada. En 1984, il rentre en
France avec sa compagne et collabore avec Jacqueline Dubaut à la Galerie du
Fleuve qu’elle dirige. Ils voyagent et séjournent en France et en Italie. En
1988, il est invité à Toronto par son ami Barry Callaghan qui est devenu son
éditeur en langue anglaise. Sa compagne, malade, reste au Canada, dans sa
famille. À partir des années quatre-vingt-dix, installé à Paris dans le
treizième arrondissement, il se consacre exclusivement à l'écriture ; il voit
toujours beaucoup de peinture, marche, écrit et traduit, entouré de nombreux
amis artistes. Il séjourne de plus en plus fréquemment dans les Pyrénées et
retourne assister aux corridas de la région. À l'occasion de la parution de
son recueil Rites et Offrandes, il reçoit le prix Charles Vildrac de la
Société des Gens de Lettres en 2003. En 2005, il reçoit le Grand Prix de
poésie de l'Académie française pour l'ensemble de son œuvre poétique. Le
Centre du livre et de la lecture lui décerne un an plus tard le prix du livre
en Poitou-Charentes pour son roman Dans l'herbe (éditions Champ Vallon, 2006).
En 2009 la médiathèque d'Issy-les-Moulineaux lui consacre une exposition :
"Robert Marteau et ses amis peintres et graveurs". En 2010, il reçoit le Prix
Mallarmé pour son recueil Le Temps ordinaire (éditions Champ Vallon, 2009). Il
est décédé le 16 mai 2011 à son domicile parisien. En 2013, l'université de
Pau lui consacre un colloque et une série de séminaires dont les actes sont
publiés aux éditions de la Licorne. En 2019 sa biographie, Mesure du ciel et
de la terre, réd...
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