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Gwenaëlle

http://skriban.wordpress.com/

Tombée dans les livres dès l'enfance, je suis aujourd'hui toujours passionnée par l'écrit. Ecrivain public, j'aide les autres à mettre en forme leurs idées. Blogueuse, je partage mes coups de cœur littéraires. Maman, je lis des histoires à mes enfants... Vous pouvez me retrouver surSKRIBAN

22,40
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6 mai 2010

Rares sont les auteurs grecs traduits en français et c’est d’abord ce qui m’a attirée vers ce livre. Le résumé, au dos, n’a fait que confirmer mon envie de le lire.
Attention, c’est un roman un peu spécial, étrange et dérangeant, tant dans sa forme que dans son contenu.
Maria a 39 ans, elle est mariée et a trois enfants. Elle vit à Athènes, dans un quartier chic. Son mari est architecte. Elle aurait pu l’être aussi mais elle a renoncé à faire carrière. En fait, elle a renoncé à beaucoup de choses, Maria. C’est ce que l’on découvre au fur et à mesure que l’on s’enfonce dans ses pensées et dans la journée. Tour à tour tendre ou cynique, Maria évoque sa famille – proche et élargie -, ses amies, sa jeunesse, ses enfants. Si dans un premier temps, l’héroïne apparait comme une simple mère au foyer, légèrement obsédée par le ménage et les acariens, peu à peu, le portrait se nuance, prend des teintes sombres, étranges, inquiétantes… Maria n’est pas tout à fait ce qu’elle paraît, loin de là mais impossible de le savoir si on n’entre pas dans sa tête car c’est essentiellement là qu’elle vit. La réalité n’est pour elle qu’un vivier où elle puise évènements, paroles, échanges pour mieux les disséquer, en comprendre les enjeux sous-jacents, tout en passant l’éponge ou le chiffon à poussière…
La pièce préférée de Maria, une salle de bains un peu basse de plafond et sans fenêtres, peut être vue comme une métaphore de sa conscience, ce lieu intime où elle n’en finit pas de s’enfermer. Et si Maria est si obsédée par les microbes qu’elle imagine pulluler dans la maison, c’est peut-être justement parce que sa conscience n’est pas très nette. Pas très propre. Elle aurait, elle aussi, besoin d’une bonne purge… Mais Maria ne veut rien lâcher. Elle vit dans l’illusion qu’elle peut tout maîtriser…Portrait sans concession d’une femme frustrée, qui attribue aux autres les raisons de sa résignation, incapable de parler avec ceux qu’elle prétend aimer, manipulatrice et froide, Les Chérubins de la Moquette est un livre qui repousse loin les limites de l’introspection. C’est aussi un livre assez emblématique, je trouve, de notre société, avec sa bonne conscience étalée à grands frais, sa misanthropie déguisée, son individualisme forcené et sa sexualité toujours mal assumée…
Le livre d’Eléni Yannakaki, une fois refermé, parait aussi glaçant que le film Psychose, d’Hitchcock car sous la banalité du quotidien, sommeille une noirceur sans fond, indissociable de notre humanité.

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3 mai 2010

L’histoire se déroule dans l’immédiat après-guerre. Londres se relève à peine des bombardements. Dans cette atmosphère bouleversée, Juliet, une jeune femme écrivain, cherche un sujet pour un prochain roman. C’est le hasard qui va se charger de lui donner une idée. Elle reçoit, en effet, la lettre d’un inconnu qui habite Guernesey et qui a acheté un livre ayant appartenu à Juliet. Ce goût partagé pour un même auteur va les inciter à quelques échanges épistolaires. Juliet, curieuse, veut en savoir plus sur ce Cercle littéraire dont lui a parlé Dawsey Adams dans ses lettres. Très vite, il lui parait évident qu’elle doit se rendre sur l’île pour faire la connaissance des différents protagonistes de l’affaire…
Ce roman n’est constitué que de lettres échangées entre les différents personnage. C’est parfois un peu répétitif et lassant mais c’est là le seul réel défaut de ce livre. Pour le reste, Le cercle littéraire des amateurs d’épluchures de patates est une histoire en apparence légère mais qui prend de plus en plus de relief et de profondeur au fil de la lecture. Juliet incarne la femme libérée par ce conflit mondial qui a bouleversé les places des uns et des autres dans la société et c’est sans doute la raison pour laquelle elle se sent si proche d’Elizabeth, l’initiatrice du Cercle, la grande absente de cette histoire et pourtant l’axe central autour duquel gravitent encore tous les protagonistes. Les livres comme salut ultime, l’amour sans préjugés, l’enfance libre, la solidarité et l’échange, l’excentricité comme mode de vie… Tous ces thèmes traversent le livre et lui donnent son épaisseur. Et quand enfin on arrive au bout de l’histoire, c’est avec une sorte de nostalgie qu’on referme la dernière page sur ce petit fragment d’île…

17,25
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30 avril 2010

Angoisse et manipulation

Ce matin-là, quand Sophie s'éveille, son monde bascule une fois encore dans l'horreur. Affolée et en larmes, elle panique et s'enfuit. Avant, tout allait bien dans sa vie. Elle avait un bon travail, un mari aimant, des projets. Maintenant, elle n'est plus que l'ombre d'elle-même, éternelle échappée d'un monde auquel elle ne comprend plus rien. Elle a dû basculer dans la folie, c'est certain... D'ailleurs, si elle se souvient bien, tout a commencé avec ces pertes de mémoire. Ce sont les premiers grains de sable qui ont détraqué lentement mais systématiquement sa vie...

Pour ne pas dévoiler un mystère essentiel à la lecture de ce livre, je ne peux pas développer davantage les pans de l'intrigue. Par contre, je peux vous dire que Pierre Lemaître a bâti une histoire totalement démoniaque. A peine aurez-vous commencé à vous pencher sur les malheurs de Sophie que vous ne pourrez plus lâcher ce livre. Il vous faudra à tout prix connaître le fin mot de l'histoire. Le suspens est total. La manipulation aussi. Une histoire qui n'est pas sans rappeler certaines nouvelles de William Irish... Un de ces romans rares dont on ressort complètement bluffé! A mettre dans les mains de tous ceux qui aiment les mystères...

Sonatine éditions

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30 avril 2010

Magnétique!

Gillian Flynn, dont c'est ici le deuxième roman, offre au lecteur des personnages fouillés, denses, profonds, pris dans une intrigue complexe. Cette Amérique des working-poor, de la bien-pensance et du qu'en-dira-t-on est parfaitement décrite, dans sa violence souterraine. Elle excelle aussi à rendre le ressenti des personnages, leurs peurs, leurs espoirs, leurs dilemmes... Il y a derrière ce roman un gros travail de documentation (les remerciements à la fin du livre le prouvent) mais cela ne suffit pas à expliquer son pouvoir magnétique. Malgré certaines longueurs - j'ai allègrement passé quelques pages - Les Lieux Sombres tient le lecteur en haleine jusqu'au bout. Impossible de reposer le livre avant de connaître le fin mot de l'histoire...

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30 avril 2010

Taxi, de Khaled Al Khamissi, est un des dix livres sélectionnés pour le prix du Télégramme. A mi-chemin entre Naguib Mahfouz et les histoires farfelues de Nasredine Hodja, il regroupe cinquante-huit conversations avec des chauffeurs de taxi du Caire. Le procédé est original et le résultat tout à fait convaincant.

Au fil des dialogues, l'auteur dresse un portrait de l'Egypte contemporaine (plus précisément de la période 2005/2006) avec ses grands maux et ses petits remèdes. C'est la voix d'un peuple qui s'exprime par la bouche des chauffeurs de taxi, pestant contre le coût de la vie, la difficile éducation des enfants, regimbant contre les tracasseries administratives et les innovations politiques qui ne mènent à rien. Politique, religion, argent, amour, beaucoup de thèmes sont abordés, plus ou moins légèrement.


Portrait en filigrane d'un pays où la corruption gangrène tout, où le système politique paraît totalement verrouillé et où les humiliations pleuvent sur une population qui ne peut que subir les ravages du capitalisme, Taxi est à la fois un recueil d'histoires et un manifeste politique. Comment, en effet, après avoir lu ce livre, ne pas vouloir tout faire pour que les choses bougent enfin? Ce n'est pas un hasard si ce recueil est rapidement devenu, après sa publication, un best-seller... J'ai bien aimé la narration, typiquement orientale même si je dois avouer que la répétition de certains thèmes m'a parfois lassée.