De « l’usage du monde » à « l’usure du monde », près de 70 ans nous séparent de la première publication (à compte d’auteur) de ce qui est devenu le chef d’œuvre du récit de voyage du XXème siècle. Le monde a en effet depuis beaucoup changé. Qu’en est-il des hommes ? Ni exotisme, ni soif avide de découverte pourtant ici, seul l’itinéraire humble et émerveillé d’un voyageur curieux et peu farouche, prêt pour l’inconnu, qui accepte, est contraint parfois, d’être transformé par le chemin. On lit comme on s’abreuve à une source insoupçonnée de sagesse, pour retrouver le sens de tout déplacement, la nécessité de l’apprentissage et le goût de la vie. Initiatique à plus d’un titre.
« La douceur ne se possède pas. On lui fait hospitalité. » Et si la douceur était puissante, au même titre que le courage et l’amitié. Ce livre est une potion bienfaitrice, pour abattre les réflexes agressifs et les mécanismes de domination qui empoisonnent nos rapports sociaux. D’une troublante actualité, un « manuel » de vie, par une philosophe bienveillante, bien trop tôt disparue.
Récit de voyage riche, sensible, paisible et documenté. Un déplacement longtemps repoussé de l’auteur d’origine libyenne à Sienne, dont la Pinacothèque deviendra vite la destination privilégiée, est l’occasion de réflexions fluides sur l’art et l’histoire de la pensée européenne des deux côtés de la Méditerranée. Ce moment de dialogue avec la peinture de la Renaissance italienne est aussi l’apprivoisement solitaire, sans peine ni douleur, du deuil et de la perte du père disparu. Apaisant et lumineux.
« A un certain moment de la vie, les murs des chambres et des pays que l’on a vus ou habités, s’écroulent, ne laissant que les murs transparents de la mémoire. »
Le journal d’une année, de celui qui fut l’assistant de Fellini, au fil des mois et des saisons… Rêves, rencontres, têtes à têtes avec les êtres et les arbres, les souvenirs et les fantômes… Et la sublime distance de la poésie.
« On se serait volontiers passer de tant de mythologie, si possible. » Le grand auteur intranquille qu’est Cesare Pavese, en se confrontant ainsi aux mythes grecs et à leurs héros, travaille à percer les mystères de l’existence. « Nous savons que le plus sûr — et plus rapide — moyen de nous étonner est de fixer imperturbablement toujours le même objectif. Et un beau jour, cet objet, il nous semblera — miraculeux — NE l’avoir jamais vu. » Étonnante manière de revenir aux classiques.