Suivez-nous
Ruskin, Proust et la Normandie, Aux sources de la Recherche
Format
Broché
EAN13
9782406130482
ISBN
978-2-406-13048-2
Éditeur
Classiques Garnier
Date de publication
Collection
BIBLIOTHEQUE PR (42)
Nombre de pages
440
Dimensions
22 x 15 x 2,4 cm
Poids
608 g
Langue
français
Fiches UNIMARC
S'identifier

Ruskin, Proust et la Normandie

Aux sources de la Recherche

De ,

Série éditée par

Classiques Garnier

Bibliotheque Pr

Offres

Pour John Ruskin, ardent amateur du Moyen Âge et du gothique en particulier, la Normandie est, avec la Picardie, le territoire le plus inspirant du Nord de la France. Cette province est un inépuisable réservoir qui lui permet d'étancher sa soif de pittoresque, mais surtout d'éprouver son analyse sur cette phase de la culture occidentale. Après la mort de Ruskin, Marcel Proust, fervent émule du savant britannique, va, non sans détermination, retrouver les parcours de celui-ci. Cette quête, davantage qu'un pèlerinage, permet à l'écrivain des rencontres révélatrices et suscite en lui des analyses qui seront déterminantes et participeront à enrichir son grand oeuvre : À la recherche du temps perdu.
S'identifier pour envoyer des commentaires.

Le , L'Armitière

John Ruskin (1819-1900) demeure inexplicablement méconnu en France. Pourtant cet Anglais, exact contemporain de la reine Victoria, parfaitement francophile, est certainement l’un des esprits les plus originaux en Europe occidentale au milieu et dans la seconde moitié du XIXe siècle. Très éclectique, Ruskin est à la fois écrivain et dessinateur, critique d’art (il est le champion de Turner) et polémiste, soucieux de l’éducation des enfants et attaché au sort des plus démunis, fasciné par la nature et forgé par la religion. De ces composantes, parfois antagonistes, naît une personnalité polymorphe, savoureuse, voire irritante…

Ce livre n’est pas un ouvrage « régionaliste » : il rassemble pour la première fois tous les textes de l’auteur consacrés à la Normandie, recueillis dans son immense production littéraire. Il s’attache à retracer scrupuleusement ses parcours, mais aussi à montrer comment chez « ce grand homme » (c’est ainsi que le nomme Marcel Proust, son fervent admirateur et traducteur) le regard sur un territoire combine toujours la jouissance critique de ce qu’il contemple et un élargissement de son analyse vers l’universel.

Ruskin s'est rendu en Normandie à huit reprises, en 1835, 1840, 1842, 1844, 1848, 1854, 1866 et 1880. Ses choix et ses moyens l’ont conduit vers certains des hauts lieux de la province : il a séjourné à Caen, à Rouen et au Mont Saint-Michel, comme à Eu, à Bayeux ou à Saint-Lô. Mais il s’est aussi dirigé vers des sites plus « secrets », comme Falaise, Coutances, Mortain, Caudebec-en-Caux… S’il s’attache à certains monuments, il semble en ignorer d’autres, s’il s’évertue à considérer le volume entier de tel édifice, il peut aussi bien s’employer à en décortiquer soigneusement un détail, et on le voit tout autant s’enflammer dans des louanges que s’abimer dans des anathèmes… : toute la singularité de cette approche est là, dans cette précieuse ambiguïté.

« [T]out le nord de la France […] est pour moi un Paradis perpétuel » a déclaré Ruskin, fasciné par un territoire dont la beauté a été si souvent saisie par de nombreux artistes anglais et surtout par son « dieu », Turner, dont il s’est efforcé de suivre les pas. Sa croyance en la supériorité du gothique français l'a attiré vers la Normandie et à Rouen en particulier, son « apothéose ». Ruskin a d’ailleurs choisi cette province pour son voyage de noces avec Effie – mariage bien éphémère ! –, où le couple est accompagné par un assistant, George Hobbs. Car il s’agit d’un séjour laborieux, pour étudier l’architecture : ainsi le trio voyage-t-il depuis Eu jusqu'au Mont-Saint-Michel, pendant plus de trois mois en 1848. Ruskin récidivera et retournera en Normandie pour renouer avec ses références. Ce travail servira de base à son importante publication, illustrée par lui-même, The Seven Lamps of Architecture (1849).

Ce texte, précisément, a eu une grande importance pour Marcel Proust (1871-1922), comme d’autres écrits de son mentor. Il semblait donc tout naturel de lier, dans le présent volume, le maître et son émule, et de faire suivre la première partie, consacrée au rapport de Ruskin avec la Normandie, d’une seconde s’attachant à celui de Proust avec cette même province.

Car si Proust s’est rendu en Normandie, sur la côte dans les années 1880 et 1890, à Rouen en 1900 (à la recherche d’une minuscule figure sculptée au portail des Libraires de la cathédrale, jadis dessinée par Ruskin), et à Cabourg ou dans les environs chaque été de 1907 à 1914, c’est d’abord pour y retrouver la trace des travaux ruskiniens, comme en un pèlerinage. Mais cette intimité a de loin dépassé ce cadre et ce territoire si proche de Paris, si couru par la belle société du début du siècle, avec Cabourg comme fleuron – où le luxueux Grand Hôtel est le « quartier général » de notre écrivain –, est devenu le domaine évident dans lequel Proust pouvait évoluer. Les sinueux méandres de cette vie élégante et mondaine, désinvolte mais exigeante, frivole mais intense, lui ont offert une abondante et fructueuse matière, propre à alimenter son inspiration dans la construction de son œuvre romanesque, À la recherche du temps perdu. Balbec, la ville imaginée par Proust, ne pouvait être qu’en Normandie…

Dans les pas de Ruskin, Proust se rend à Caen et à Lisieux, belles villes
moyenâgeuses. Il s’émerveille devant les beaux vitraux de l’église de Conches ou de la cathédrale d’Évreux. Il est très sensible aux sonorités des noms normands, parmi lesquels Bayeux, qui lui évoque une ville « si haute dans sa noble dentelle rougeâtre et dont le faîte était illuminé par le vieil or de sa dernière syllabe ». Il visite le château de Balleroy, pour y contempler les tapisseries, et celui de Glisolles, où il entreprend même d’initier les propriétaires, le marquis et la marquise de Clermont-Tonnerre, à Ruskin !

Pour Proust, comme pour Ruskin, on trouvera ici le catalogue méticuleux de tout ce qui le relie à la Normandie, ses séjours bien sûr, mais aussi mille et un détails, parfois furtifs, mais qui sous sa plume acquièrent une singulière valeur.

Ce recueil – fruit d'une fructueuse collaboration britannico-française – vaut tout autant pour le témoignage qu’il livre sur son temps, que par ce qu’il rend compte de deux esprits puissants et libres. Il fait suite à L’Œil de Ruskin. L'exemple de la Bourgogne, publié en 2011 par les mêmes auteurs. Ceux-ci avaient d’ailleurs déjà œuvré ensemble auparavant, pour la préparation de l’exposition présentée au musée d’Amiens en 2003, Ruskin-Turner. Dessins et voyages en Picardie romantique.

-------------------------------

Les auteurs :

Cynthia Gamble est connue pour ses multiples travaux sur Ruskin et Proust. Parmi ses nombreuses publications, signalons notamment parmi les plus récents : Proust as Interpreter of Ruskin : The Seven Lamps of Translation (2002) ; John Ruskin, Henry James and the Shropshire Lads (2008) ; Wenlock Abbey 1857-1919 : A Shropshire Country House and the Milnes Gaskell Family (2015) ; Voix entrelacées de Proust et de Ruskin (2021). Elle est Honorary Research Fellow de l’Université d'Exeter.

Matthieu Pinette est conservateur en chef du patrimoine. Il a dirigé les musées des villes d'Autun, Besançon et Amiens. À Amiens, il a été commissaire général de l'exposition Ruskin-Turner. Dessins et voyages en Picardie romantique (2003), grâce à la collaboration de Cynthia Gamble et Stephen Wildman. Actuellement, il œuvre à la valorisation du Château de Germolles (Bourgogne), ancienne demeure des ducs de Bourgogne (XIVe s.), qui est aussi une propriété familiale.

Autres contributions de...

Plus d'informations sur Cynthia J. Gamble
Plus d'informations sur Matthieu Pinette
Plus d'informations sur Luc Fraisse